Nous souhaitons analyser dans cet article un arrêt récent de la Cour suprême sur un sujet qui est , malheureusement, d’actualité : l’exhérédation en Espagne. Nous aborderons plus spécifiquement si les parents peuvent exclure leurs enfants du testament, en les privant ainsi de la partie réservataire qui leur correspond en vertu de la loi et s’il est possible de déshériter un enfant en raison du manque de relation avec ses parents et d’une violence psychologique.
Système des parts des héritiers réservataires : l’Espagne et les pays voisins.
En Espagne et dans d’autres pays voisins, comme la France ou la Belgique, une grande partie des biens de l’héritage se “réservent” à certains héritiers. C’est-à-dire qu’il n’y a pas la liberté de disposer des biens comme on l’entend. La partie des biens du défunt qui, de par la loi, est réservée aux “héritiers réservataires” est connue en Espagne sous le nom de « légitime » ou de « réserve héréditaire ». En Espagne, la réserve héréditaire des enfants représente 2/3 parts de l’héritage.
Ce système réservataire heurte complètement la liberté existante dans des pays comme le Royaume-Uni, où un adulte peut léguer ses biens à la personne de son choix (qu’il s’agisse ou non de son enfant, d’un conjoint, d’un parent proche, etc.).
Les causes d’exhérédation des enfants en Espagne. Le Code civil.
Pour pouvoir déshériter un enfant en Espagne il faut que concourent certaines des causes prévues dans le Code civil. Les motifs spécifiques d’exhérédation des enfants sont réglementés dans l’art. 853, qui dit :
“Seront également justes causes pour déshériter les enfants et les descendants en plus de celles indiquées dans l’article 756 aux numéros 2, 3, 5 et 6, les suivantes :
- 1èreAvoir refusé, sans motif légitime, l’obligation alimentaire au parent ou à l’ascendant qui le déshérite.
- 2eAvoir commis un acte de maltraitance physique ou psychologique ou d’insulte ou d’injure graves.”
Jurisprudence de la Cour suprême : la violence psychologique et l’exhérédation.
Les causes d’exhérédation prévues à la deuxième section (maltraitance physique ou psychologique ou injure grave) ont traditionnellement été comprises comme des agressions ou des actes de violence physique. Cependant, depuis 2014, la Cour suprême a également inclus la violence psychologique. Le principal problème de l’arrêt qui a ouvert la porte à l’exhérédation pour des raisons de violence psychologique est qu’il était peu concret et peu précis dans la description des faits. Il parlait d’enfants qui avaient « abandonné émotionnellement » leur père au cours des 7 dernières années de sa vie, ne lui montrant aucun intérêt et ne le contactant à aucun moment. Mais il n’y avait pas beaucoup plus de détails. La question est donc : l’absence de relation constitue-t-elle une violence psychologique ?
L’arrêt 419/2022 : l’absence de relation ne justifie pas l’exhérédation.
L’arrêt du 24 mai 2022 nous éclaire un peu cette affaire. D’une part, il confirme une fois de plus qu’effectivement la violence psychologique peut être une cause d’exhérédation, mais en même temps, il précise que l’absence de relations parents-enfants n’équivaut pas automatiquement à une « violence psychologique » et que cela dépendra des circonstances particulières de chaque cas. Pour qu’il y ait violence psychologique :
.- L’absence de relation entre le défunt et les héritiers doit être exclusivement attribuable aux héritiers en question.
.- Suite à l’analyse des circonstances spécifiques, il faut pouvoir prouver que cette absence de relation a causé un préjudice psychologique au testateur.
Conclusions
L’exhérédation en Espagne est une figure complexe. L’absence de relation entre parents et enfants peut être un motif d’exhérédation, mais cela dépendra des circonstances particulières de chaque cas. Il faut donc réaliser une étude détaillée de chaque situation. Chez White Baos Abogados nous sommes experts en droit de la famille, en testaments et droit des successions. N’hésitez pas à nous contacter, nous vous offrirons un conseil juridique expert sur ces questions et d’autres.
L’information fournie dans cet article ne prétend pas être un conseil légal, il transmet simplement des renseignements d’ordre général sur des questions juridiques.
Carlos Baos (avocat)
White & Baos.
Tél : +34 966 426 185
E-mail : info@white-baos.com
White & Baos 2023 – Tous les droits réservés.
